Comme cela était anticipable, malgré les efforts importants réalisés ces derniers mois, les retards pris dans la mise en conformité et en application des engagements internationaux en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, provoquent une double peine pour les entrepreneurs monégasques qui vont à la fois subir les effets de la surveillance renforcée et ceux des enjeux statistiques visant à démontrer l’efficacité des dispositifs par l’augmentation des sanctions qui, rappelons-le, devront être proportionnées.

Le récent placement de Monaco sur la liste grise du GAFI signifie concrètement plus de contraintes pour les entreprises et les milieux d’affaires en général. Au quotidien, il risque d’induire de la défiance de la part de certains investisseurs, clients et fournisseurs étrangers des entreprises monégasques, et de ce fait les inciter à mettre en œuvre des mesures encore plus drastiques dans le cadre d’opérations en lien avec Monaco, et donc potentiellement impacter négativement l’activité économique et retarder la marche des affaires et les investissements, dans un contexte international toujours plus compétitif.

Déjà, avant que Monaco soit placé en liste grise, les entreprises que nous représentons étaient nombreuses à nous faire part de leurs inquiétudes face à la hausse constante des responsabilités et des obligations législatives accrues, sans commune mesure avec des juridictions voisines, particulièrement en termes de niveau des sanctions pénales encourues. Les entreprises monégasques, qui sont majoritairement des PME/TPE, n’ont pas toutes les moyens d’embaucher du personnel dédié. Les entrepreneurs sont accaparés par les informations à collecter, et de plus en plus monopolisées par des tâches administratives au détriment de ce qui est et doit rester leur raison d’être : le management de leur entreprise.

Puisque les transpositions des recommandations du comité Moneyval et du GAFI n’ont pas permis d’éviter le placement en liste grise, il nous faudrait revenir à un modèle équilibré, qui soit conforme aux recommandations des organismes internationaux sans aller au-delà, pour éviter autant que faire se peut des départs d’entreprises et d’investisseurs, et leur impact sur l’emploi et le budget de l’État. Il faudrait aussi s’assurer que les organes de contrôle récemment structurés soient en mesure de « juger » les assujettis conformément à la doctrine des pratiques de place et de manière proportionnée.

Il en va de l’attractivité de Monaco et de la survie de notre prospérité économique et sociale.

Philippe Ortelli
Président